26 Mai PREJUDICE / Indemnisation des frais de logement adapté
Le principe de réparation intégrale du préjudice est bien illustré par l’analyse d’un poste de dépense important tel que le logement.
En effet, pour accéder à un logement adapté à son handicap, la victime débourse souvent des frais très conséquents.
La nomenclature Dintilhac défini les frais de logement adapté comme : « frais que doit débourser la victime directe à la suite du dommage pour adapter son logement à son handicap et bénéficier ainsi d’un habitat en adéquation avec son handicap ».
Cette indemnisation se situe en phase post-consolidation du handicap. Une indemnisation pré-consolidation est possible au titre du post de préjudice temporaire.
L’accès à un logement adapté peut passer par l’adaptation du logement actuel de la victime, que celle-ci soit locataire ou propriétaire.
Lorsque des travaux d’aménagement ne sont pas possible dans ce logement, la victime peut se voir indemniser les frais nécessaires à l’acquisition et l’adaptation d’un nouveau logement.
1° L’adaptation du logement actuel
La première mesure d’adaptation possible, et privilégiée, est la réalisation de travaux dans le logement actuel de la victime. Les travaux nécessaires sont déterminés par un expert, en fonction du niveau de handicap de la victime, puis chiffrés par des techniciens assistant les parties. L’indemnisation est fixée par le juge, en fonction de la situation et des besoins individuels de la victime.
Ces aménagements peuvent être réalisé dans le logement loué par la victime, s’ils ne sont pas trop importants, dans le logement qu’elle possède, ou dans le logement d’un proche si la victime y réside de façon permanente.
Exemples : aménagement de la cuisine ou de la salle de bain.
La victime peut apporter la preuve des frais d’aménagement par tous moyens.
Exemples : devis, facture…
2° Le déménagement vers un logement adapté
Lorsque le maintien dans le logement initial n’est pas possible, la victime peut justifier d’un besoin de changer de logement. C’est à elle de démontrer qu’elle ne peut pas aménager son logement existant.
Exemple :
- Nécessité d’une chambre et salle de bain supplémentaire pour l’accueil d’une tierce personne aidante ;
- Victime paraplégique logeant dans un immeuble sans ascenseur ;
- Nécessité d’aménagements suffisamment lourds pour être incompatible avec le caractère provisoire d’une location.
- Changement de location
Lorsque la victime locataire change de logement pour une nouvelle location adaptée à ses besoins, elle est indemnisée du surcoût de loyer lié au nouvel appartement.
- Acquisition d’une propriété
L’achat d’un logement peut s’avérer nécessaire, notamment pour y réaliser des travaux importants.
Il a été plaidé par les compagnies d’assurance que seuls les frais d’aménagement du logement acquis devraient être indemnisés, au motif que l’acquisition d’un logement conduirait à un enrichissement injustifié de la victime. Mais depuis 1996 et de façon constante, la Cour de cassation admet que lorsque l’achat d’une résidence est nécessaire, par exemple pour pouvoir y réaliser des aménagements importants, le coût total de l’acquisition peut être indemnisé. La nécessité d’acquisition du logement doit alors être une conséquence directe des séquelles du dommage. La Cour de cassation rappelle cette position dans son arrêt de la 2ème chambre civile du 17 octobre 2024 (n°22-19.795) :
« En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, compte tenu de l’importance des travaux d’aménagement et du caractère provisoire de la location, l’acquisition d’un logement mieux adapté n’était pas nécessaire pour permettre à la victime de bénéficier de manière pérenne d’un habitat adapté au handicap causé par l’accident, la cour d’appel a privé sa décision de base légale. »
Lorsque le logement est acquis avec un conjoint, la part payée par le conjoint de la victime n’est pas indemnisée.
Sont aussi indemnisés à ce titre, les frais de déménagement et d’emménagement. L’indemnisation d’aménagement supplémentaires dans le nouveau logement est toujours possible.
Conclusion :
L’évaluation de l’indemnisation des frais de logement adaptée est faite au cas par cas par les juges du fond. L’indemnisation suppose toujours la preuve du lien de causalité direct entre le dommage et l’aménagement effectué. Lorsque ce lien est démontré, l’indemnisation couvre les frais de déménagements, de travaux, de surcoût de loyer et même d’acquisition d’un logement.