ABUS DE FAIBLESSE / L’abus de faiblesse en matière de relations sexuelles entre un psychiatre et sa patiente

ABUS DE FAIBLESSE / L’abus de faiblesse en matière de relations sexuelles entre un psychiatre et sa patiente

COMMET UN ABUS DE FAIBLESSE LE PSYCHIATRE QUI CONDUIT SA PATIENTE A AVOIR DES RELATIONS SEXUELLES ALORS QU’ELLE SOUFFRAIT DE TROUBLES PSYCHIQUES ENTRAINANT UNE GRANDE APPETENCE SEXUELLE DONT IL AVAIT CONSCIENCE

Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 février 2014, 12-87.558

  • Définition de l’abus de faiblesse

Selon l’article 223-15-2 du Code pénal, l’abus de faiblesse est défini comme :  « l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse soit d’un mineur, soit d’une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur, soit d’une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l’exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement, pour conduire ce mineur ou cette personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables ».

L’auteur de l’infraction doit avoir abusé de l’état de vulnérabilité de la victime, tout en ayant connaissance de cet état.

Contrairement à l’abus de confiance, il ne s’agit pas pour l’auteur d’abuser de la confiance qu’il a acquis auprès des victimes.

Doivent être réunis les conditions suivantes :

-un état d’ignorance ou une situation de faiblesse du fait de la minorité ou de la particulière vulnérabilité de la victime,

-cet état d’ignorance ou cette situation de faiblesse est apparent ou connu de l’auteur,

-l’abus de faiblesse doit avoir eu pour objectif un acte ou une abstention de la part de la victime,

-L’abus de faiblesse doit avoir porté gravement préjudice à la victime.

  • Exemples d’actes d’abus de faiblesse

Une aide-ménagère ayant profité de la faiblesse de la personne âgée pour qui elle travaillait afin de lui soutirer la somme totale de 164.000 euros a été condamnée par le Tribunal correctionnel de LIMOGES (https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/haute-vienne/limoges/video-temoignage-elle-est-escroquee-de-toutes-ses-economies-par-l-aide-menagere-a-son-service-pendant-17-ans-2691774.html).

Un père de famille, son fils et un troisième membre de la famille ont été condamnés par le Tribunal correctionnel des SABLES D’OLONNE à des peines allant d’un an à trois ans d’emprisonnement ferme aménageable pour avoir abusé de la faiblesse d’une personne âgée. Ils l’avaient démarché dans le cadre de leur activité professionnelle de travaux et lui avaient signer des chèques à leur profit, y compris alors que ce dernier se trouvait à l’hôpital (https://actu.fr/pays-de-la-loire/les-sables-d-olonne_85194/abus-de-faiblesse-en-vendee-une-famille-allait-jusqua-faire-signer-des-cheques-en-blanc-a-un-vieil-homme-a-lhopital_59661882.html).

Un gourou a été condamné par la Cour d’assises de GIRONDE à la peine de 18 ans de réclusion criminelle pour des faits de viols et d’abus de faiblesse dans le cadre de la secte qu’il avait mis en place et l’endoctrinement de jeunes femmes dont sa fille (https://www.leparisien.fr/gironde-33/claude-alonso-alias-le-gourou-zeus-condamne-a-18-ans-de-prison-pour-viols-et-abus-de-faiblesse-23-09-2022-5J6EAOGWRFHOBHAXMUWT2CT2EA.php).

  • En pratique : cas d’un psychiatre avec une patiente atteinte de troubles bipolaires dans l’affaire citée

Le 19 février 2014, la Cour de cassation a validé la décision de la Cour d’appel ayant condamné un psychiatre.

En l’espèce, la victime avait été diagnostiquée bipolaire de type 1 dans les années 2000 et avait un comportement instable selon ses proches.

Entre juillet et octobre 2005, période de prévention, elle était hospitalisée à trois reprises sous contrainte, et transférée dans le service du condamné.

Son état de faiblesse était déduit de son état psychique particulièrement instable ainsi décrit.

Il a été jugé que le condamné avait connaissance de cet état de faiblesse pour plusieurs raisons :

-il avait accès à son dossier médical,

-elle était hospitalisée sous contrainte à trois reprises en deux mois et demi,

-il bénéficiait d’une certaine expérience professionnelle,

-il avait bénéficié d’une formation en psychiatrie.

Par ailleurs, l’état de la victime était parfaitement connu, compte tenu de son diagnostic ancien.

Or, il avait donc connaissance du fait que dans le cadre de cette maladie, le patient a des phases dites « maniaques » au cours desquelles il vit une grande exaltation et a notamment une grande appétence sexuelle.

La victime avait développé des sentiments amoureux à l’égard du condamné, qui auraient dû entrainer de la part de ce dernier une prudence et une distanciation professionnelle.

A la place, il alimentait ces sentiments par des cadeaux, des discussions personnelles afin de faire croire à une complicité, des invitations et des propositions de logement dans le cabinet médical, et par le fait de donner son numéro de téléphone et le n° de sa chambre d’hôtel.

En outre, le condamné avait fait faire à la victime deux tests HIV en dehors des périodes d’hospitalisation ayant entrainés une confusion et une soumission affective de la victime.

Il bénéficiait dès lors de relations sexuelles avec sa patiente.

Selon les juges, l’état de faiblesse de la victime était caractérisé, mais plus encore connu du condamné qui en a abusé afin d’obtenir des relations sexuelles, nuisant à l’intégrité du malade et violant les règles de déontologies.

Il était ainsi condamné à une peine d’un an d’emprisonnement avec sursis et une interdiction d’exercer son activité de psychiatrie durant un an.

Les juges ajoutaient que l’abus de faiblesse pouvait être constitué d’un acte matériel ou juridique.